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La paix

Ce lundi 16 mai, est célébrée, depuis maintenant 5 ans, la Journée Internationale du Vivre-Ensemble en Paix. Il serait intéressant que nous relisions tous, les résolutions adoptées par les Nations Unies car elles sont loin d’être respectées, malheureusement.

Merci à toutes les personnes qui ont participé à nos questions interactives et à l’écriture du contenu. La première question nous a permis de créer le nuage de mots suivant :

C’est le mot « Amour » qui a remporté le plus de voix (13 sur 32 répondants).

« Tout acte d’amour est une œuvre de paix. » Mère Teresa (1910-1997)

La paix : définition

Selon la définition du Larousse, la Paix recouvre plusieurs sens :

  • État de pays, de nations qui ne sont pas en guerre.
  • Cessation de l’état de guerre entre deux ou plusieurs belligérants.
  • État de concorde, d’accord entre les citoyens, les groupes sociaux et donc absence de luttes sociales, de troubles sociaux.
  • État d’un groupe, de personnes qui ne sont pas en querelle, en conflit.
  • État de tranquillité, de repos chez quelqu’un
  • État de quelqu’un qui jouit du calme intérieur ; tranquillité d’âme
  • Absence d’agitation, de bruit dans un lieu

Nous allons donc mener la réflexion à différents niveaux : au niveau des États, de la cité et à l’échelle de l’individu.

Signification de la paix

Raymond Polin (1910-2001), dans son écrit « Sur la Signification de la Paix d’après la Philosophie de Hobbes », confronte différents travaux sur le sujet de la paix : la paix positive (l’ordre naturel des choses, la sociabilité naturelle de l’homme) et la paix négative (la guerre comme l’ordre naturel des choses).

La paix positive selon Saint Augustin (354-430), Aristote (384-322 av.JC) et Locke (1632-1704)

Dans cette première partie, l’analyse de la signification de la paix est basée sur l’ordre naturel des choses, la sociabilité naturelle de l’homme.

« Pour Saint Augustin, l’amour pour un même objet rassemble autour de lui tous les hommes qui l’éprouvent et tisse entre eux des liens sociaux. Il peut exister autant de cités qu’il y a de sortes d’amours ressentis en commun. » Ainsi, nous pourrions trouver de nombreux exemples d’individus qui se relient socialement par passion, amour ou convictions, dans la pratique d’une religion, d’activités sportives, artistiques, dans des actions de bénévolat pour une cause particulière, etc.

Il ajoute également que « La paix s’identifie à l’existence d’un ordre, et à la tranquillité de la vie selon un ordre. […] L’ordre de la cité temporelle n’est même pas négatif par rapport à l’ordre de la cité céleste, même si la paix selon les hommes n’est que la dérision de la paix selon Dieu, et la justice des hommes, une injustice par rapport à la justice de Dieu. […] Ceux qui ont fait bon usage de la paix ici-bas pourront jouir de la paix éternelle. » Ici, on retrouve donc une dimension spirituelle : la paix transcendante, la paix de l’au-delà. Dans cette vision, il y a une loi de la nature universelle qui régit l’homme souverain. Le consentement à cet ordre transcendant serait animé par l’amour, l’entraide.

Aristote explique la paix comme une finalité, un objectif universel. L’écriture d’une Constitution, basée sur le droit naturel, la loi de la nature, la loi universelle, sans tenir compte des particularités des différentes communautés, permettrait aux individus d’agir de manière juste et bonne, de développer le meilleur d’eux-mêmes et ainsi d’être heureux.

Locke évoque également la loi de la nature universelle, avec pour objectif la paix de l’humanité, mais de manière plus rationnelle que spirituelle. «La raison, qui est cette loi naturelle elle-même, enseigne à tous les hommes que, chacun étant égal à tous les autres et indépendant d’eux, nul ne doit faire de tort à personne, que ce soit dans sa vie, dans sa liberté ou dans ses biens. […] L’état de nature est un état de paix, de bonne volonté, d’assistance et de conservation mutuelles. Les hommes y vivent en commun conformément à la raison, sans chef, sans juge et sans autre loi que la loi naturelle.»

Pour Locke, « Dans l’état de nature, la guerre ne cesse que si l’agresseur accepte d’y mettre fin, propose la paix, la réparation des dommages causés et donne des assurances sur la sécurité de l’avenir. »

« Pour faire la paix, il faut être deux : soi-même et le voisin d’en face. » Aristide Briand (1862-1932)

Il considère que la guerre est justifiée et légitime dans le cas où un peuple souhaite récupérer ses droits.  « Toute autre guerre, c’est-à-dire toute guerre qui porterait atteinte au droit d’autrui, est injuste

La paix négative selon Hobbes (1588-1679) et Marsile de Padoue (1275-1342)

Dans cette deuxième partie, la signification de la paix ne se base plus sur la sociabilité naturelle de l’homme mais sur la guerre comme ordre naturel des choses.

« Ce qui unit les hommes, c’est qu’ils luttent ensemble. » Hobbes pense que l’homme recherche naturellement la gloire, le pouvoir. Par conséquent, il lutte contre les autres et à leur détriment, afin de les dominer. C’est l’amour de soi avant l’amour des autres. Si l’homme n’est pas discipliné, ne se dote pas d’une raison et ne dompte pas son égo, il sera forcément malintentionné, méchant.

« Tandis que l’accord entre les animaux est naturel et s’appuie sur un consentement spontané, chez les hommes, il est artificiel et il s’appuie sur une convention, ce qui n’est pas du tout la même chose. Il faut qu’un instrument artificiel vienne rompre la continuité de la guerre et imposer, par la discipline, cette vie pacifique et sociale à laquelle l’homme n’est pas conduit par la nature »

« On ne fait la guerre que pour vaincre, c’est-à-dire pour établir une paix selon sa volonté. Même le méchant veut faire régner sa paix .» (pour son propre bénéfice)

Pour Marsile de Padoue, seul la paix civile existe : une paix qui se base sur le consentement à un ordre. « Vouloir la paix, c’est donc vouloir vivre en société, consentir à vivre avec d’autres hommes, décider de participer à une existence politique. »

«  Marsile, tout comme Hobbes, est amené à faire allusion à l’idée d’une paix entre les nations, introduite, comme une paix civile, à l’intérieur d’un État devenu universel »

Une multitude d’ordres existent pour faire émerger la paix. Et seule l’adhésion des citoyens à un ordre permet d’obtenir cette paix. Lorsque l’existence de cet ordre n’est pas reconnu par le peuple, pour diverses raisons (non respect de la démocratie, des droits de l’homme, etc.), il peut s’enclencher une guerre.

La guerre est-elle inévitable ?

John Kenneth Galbraith (1908-2006), économiste et auteur de « La paix indésirable », pense que la paix permanente est une utopie. Le système économique, politique et social dans lequel nous sommes actuellement aura forcément pour conséquence des guerres.

« Tous les peuples sont pour la paix, aucun gouvernement ne l’est. » Paul Léautaud (1872-1956)

Pourtant, lorsque l’on réfléchit bien, il peut nous arriver d’être en conflit, même si ce sont seulement des petites discussions, avec notre famille, nos amis, nos collègues, nos voisins ou même des inconnus. Si nous n’arrivons pas à être en paix avec ceux qui nous entourent, comment allons-nous réussir à vivre en paix à l’échelle d’un pays ou encore au niveau mondial ?

« Si l’on n’est pas en paix avec soi-même, est-il possible de l’être avec les autres ? » Douglas Kennedy (1955-)

Le droit comme règles pacifiantes

Emmanuel Kant (1704-1824) pense que « l’homme est mauvais par nature ». Au-delà d’un « système » d’organisation sociétal, l’homme finira toujours par faire des guerres. Néanmoins, il souligne que la raison de l’homme, le pousse à vouloir la paix. Donc il serait important de développer continuellement la raison de l’homme. Ce progrès moral sociétal reposerait sur la base du droit universel (cf. Aristote plus haut).

« C’est à l’homme de faire triompher la paix, l’ordre et la raison, contre la guerre, le désordre et l’égoïsme. »

L’argent comme source de conflit

Le modèle de société capitaliste, basé sur le profit, l’exploitation des ressources et des êtres humains ne peut apporter la paix, puisqu’il y a d’un côté les exploitants et de l’autre côté, les exploités. Ainsi, les exploitants pensent à leurs intérêts personnels avant le bien commun. Les exploités y perdent peu à peu leur dignité, en étant soumis à ceux qui profitent de leur dur labeur.

« La paix et la dignité naissent à l’instant où l’ambition et l’arrogance meurent. » Edward Young (1681-1765) 

Et si nous réfléchissions à un monde non marchand ?

Récemment, est né le projet MOCICA pour un monde sans argent. Le fondateur de ce nouveau modèle de société pense que c’est en supprimant l’argent que nous arriverons à résoudre tous les problèmes sociétaux, qu’ils soient écologiques, économiques, sociaux, etc. Il nous invite à réinventer le monde de demain pour faire émerger un paradigme du partage, du respect, de la coopération, et de la citoyenneté.

L’éducation comme outil de développement personnel

Si nous en sommes arrivés à un système compétitif plutôt que collaboratif, c’est parce que nous avons été formaté de cette façon dès le plus jeune âge, à l’école. Le mode de notation nous incite à nous comparer les uns aux autres au lieu de s’enrichir les uns des autres en travaillant ensemble.

Nous pouvons aussi remarquer que dans les jeux de sociétés, il y a toujours des gagnants et des perdants. Le gagnant aura toujours un sentiment de satisfaction qui augmentera son estime de soi mais qu’en est-il du perdant ? Est-ce que le fait de perdre à un jeu peut diminuer la confiance en soi et freiner voir empêcher ainsi le développement de son plein potentiel ?

« Établir la paix durablement est le travail de l’éducation. La politique ne peut qu’éviter la guerre. » Maria Montessori (1870-1952)

Depuis quelques années, nous voyons émerger divers outils éducatifs :

La Communication Non Violente (CNV)

La CNV est une méthode de communication développée, il y a à peine 50 ans, par Marshall Rosenberg (1934-2015). Auteur du livre « Les mots sont des fenêtres (ou bien ce sont des murs) », il s’est inspiré de nombreuses personnes, à commencer par le psychologue humaniste Carl Rogers (1902-1987), mais également de grands noms, comme Gandhi (1869-1948) ou encore Martin Luther King (1929-1968).

Le but de la Communication Non Violente est d’apprendre à communiquer de manière bienveillante, sans agressivité, sans jugement, sans nuire à autrui. Ce travail de communication consciente, s’il est fait avec authenticité, va permettre de développer l’écoute, l’empathie, la compréhension, l’ouverture à l’autre.

« La paix ne peut être réalisée par la violence, elle ne peut être atteinte que par la compréhension. » Raph Waldo Emerson (1803-1882)

Les pédagogies dites « alternatives »

De nouvelles approches éducatives fleurissent de plus en plus : Montessori, Freinet, Steiner, école démocratique, etc. Leurs spécificités consistent à se baser sur les besoins de l’enfant, le respect de son rythme, l’autonomie, l’expérimentation, etc.

« L’éducation est une arme de paix. » Maria Montessori 

Dans ces écoles, l’adulte ne se positionne plus comme un maître autoritaire et directif, mais plutôt comme un facilitateur bienveillant, qui va aider l’enfant à développer son plein potentiel. Il y a une plus grand liberté d’apprentissage avec la possibilité, pour les enfants, de choisir leurs activités. Cela a pour but de susciter leur intérêt, développer leur curiosité et leur permettre l’expression de leur créativité.

Les jeux collaboratifs

De plus en plus de jeux collaboratifs sont commercialisés ces dernières années.

A titre d’exemple, le jeu Terrabilis sensibilise à la protection de notre planète. Les joueurs vont avoir à gouverner un pays, installer des infrastructures, gérer des ressources, etc. A l’instar du Monopoly, il ne suffira pas d’accumuler les richesses pour gagner. La coopération et la préservation des ressources seront deux critères primordiaux pour ne pas faire exploser la planète.

Comme nous avons pu le voir, des solutions pacifiantes ont vu le jour il y a peu, en comparaison de l’histoire des « Homo Sapiens ». Cela peut nous donner espoir pour la co-construction d’un avenir meilleur. En effet, nous n’avons plus d’excuses. Nous avons de nombreux outils pour réussir à ne pas reproduire les erreurs, les schémas du passés !

« L’intelligence défend la paix. L’intelligence a horreur de la guerre. » Paul Vaillant-Couturier (1892-1937)

Il est donc indispensable, sinon primordial d’œuvrer au niveau de l’éducation des enfants et du développement personnel des adultes pour responsabiliser chacun d’entre nous quant à nos actes et à nos comportements et assurer un monde de paix :

« Si tu veux la paix dans le monde,
il faut la paix dans ton pays.
Si tu veux la paix dans ton pays,
il faut la paix dans ta région.
Si tu veux la paix dans ta région,
il faut la paix dans ta ville.
Si tu veux la paix dans ta ville,
il faut la paix dans ta rue.
Si tu veux la paix dans ta rue,
il faut la paix dans ta maison.
Si tu veux la paix dans ta maison,
il faut la paix dans ton coeur. »

Mahatma Gandhi

 

Conclusion

Pour vivre en paix avec les autres, il est nécessaire d’avoir un esprit d’ouverture, d’écoute et de compréhension de l’autre sans vouloir imposer, même avec empathie, notre propre idéologie. Il est également fondamental de mener un travail intérieur afin de trouver la paix en soi même. Comment pouvons-nous propager la paix à l’extérieur si nous sommes en guerre à l’intérieur ? Les êtres humains ont tendance à porter inconsciemment le bagage de leurs ancêtres : leurs croyances, leurs peurs, leurs blessures et leurs conflits. C’est de là que vient la séparation et la fragmentation de l’être humain avec lui-même et avec les autres. Pour pouvoir apprendre à vivre en paix, nous sommes invités à déconstruire nos croyances, à évacuer les peurs et à guérir les blessures qui appartiennent à un passé révolu. A chacun d’entre nous de cultiver en nous le discernement, l’empathie et la conscience. Sans cela nous continuerons à alimenter inconsciemment les rivalités. Les clefs du nouveau monde que nous voulons voir émerger des cendres de l’ancien sont en chacun de nous : à nous d’aller les chercher !

Cette semaine, vous pouvez venir échanger avec nous, sur Discord, sur le thème de la fraternité 🙂